Dans la maison la plus vieille du faubourg,
Tout près des toits, jolie comme les amours,
Chantant toujours et riant aux éclats,
On l'appelait Cœur de Lilas.
Mais un journal ayant fait un concours
Elle fut choisie comme Reine du jour,
Et souveraine, elle partit un matin
Dans une auto, en robe de satin...
Sur le trottoir, les vieilles du quartier
Lui murmuraient en la voyant passer :
Cœur de Lilas
Ta beauté fait battre tous les cœurs
Tous les bonheurs, dans le monde,
On te les offrira !
Mais n'y crois pas !
Car là-bas les plaisirs sont trompeurs
Le vrai bonheur c'est chez nous mon petit Cœur des Lilas !
Les cartes postales, les théâtres, les journaux,
Le monde entier reproduisit ses photos
Et dans sa loge le soir à l'Opéra,
On venait voir Cœur de Lilas.
Pendant ce temps, au fond du vieux faubourg,
Lui le premier qui lui parla d'amour
Son petit voisin, un gamin de vingt ans
Pleurait tout seul la fin de son roman...
Désespéré, regardant son portrait
Joignant les mains tout bas il soupirait :
Cœur de Lilas
Ta beauté fait battre tous les cœurs
Tous les bonheurs, dans le monde,
On te les offrira !
Mais n'y crois pas !
Car là-bas les plaisirs sont trompeurs
Le vrai bonheur c'est chez nous mon petit Cœur des Lilas !
Mais un beau soir, en rentrant de travailler,
Quelqu'un chantait dans la chambre à côté
Et tout surpris en tremblant il frappa :
<< Comment c'est toi, Cœur de Lilas ? >>
<< Mais oui c'est moi, dit-elle en souriant
Tu me regardes, je suis fait' comme avant
Que cherches-tu ? Mes toilettes mes bijoux.
Tu as cru ça ? Serais-tu devenu fou ?
Va ne crains rien, je suis digne de toi
Viens m'embrasser comme au temps d'autre fois !
Cœur de Lilas
Pour un jour a fait battre les cœurs
Tous les bonheurs, dans le monde,
On me les prodigua.
Je n'y crois pas
Car là-bas les plaisirs sont trompeurs
Mon vrai bonheur, c'est de rester ton petit Cœur de Lilas !